Chirurgie au Sénégal : L’intelligence artificielle pas à l’ordre du jour

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Le Sénégal a connu des avancées majeures dans le domaine de la chirurgie. Mais pas assez, à ce stade, pour intégrer l’intelligence artificielle. Ainsi, c’est la démarche qualité et la multidisciplinarité qui seront abordées lors des journées annuelles de la chirurgie qui s’ouvrent le 20 décembre.

L’intelligence artificielle est le futur de la pratique médicale. Pourtant, elle n’est pas à l’ordre du jour au Sénégal. L’affirmation est du Pr Babacar Diao, chef du département chirurgie et médecine chirurgicale à la faculté de médecine de l’Ucad. Il animait un point de presse avec Pr Mamadou Seck, en prélude aux 26ème journées annuelles de chirurgie couplées aux 7ème journées conjointes des départements de chirurgie du Sénégal, prévues du 20 au 22 décembre 2022.

Interpellé sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la chirurgie au Sénégal, le spécialiste a fait savoir que cette problématique ne sera pas à l’ordre du jour durant les journées médicales. La raison est  simple : le Sénégal n’a pas encore les préalables pour appliquer cette technologie de pointe en chirurgie. « Pour parler d’intelligence artificielle, il faut d’abord parler d’utilisation de données. Nous ne sommes pas encore au stade où nous avons un data center qui nous permet de collecter nos données dans nos hôpitaux sur nos malades pour développer des algorithmes », souligne-t-il.

Selon lui, en ophtalmologie, il y en a qui travaillent avec l’école supérieure polytechnique. Ce qui veut dire que ce serait possible dans certaines disciplines.

S’agissant de la pratique chirurgicale, il y a des travaux de recherches démarrés depuis quelques années, pour le développement d’un modèle d’échographie de la taille d’un téléphone portable. Une trouvaille qui pourrait reléguer la télémédecine au second plan. « Il faut qu’on puisse travailler avec l’école supérieure polytechnique, ceux qui font génie informatique pour mettre en place ces programmes d’intelligence artificielle dans le cadre de la chirurgie », lance-t-il.

En fait, Il y a quelques timides initiatives, notamment un modèle de neuronavigation au département de chirurgie de la fac médecine en collaboration avec un hôpital de Boston ou alors un programme d’intelligence artificielle à l’hôpital militaire de Ouakam et qui concerne la pathologie rénale et le cancer de la prostate. Des projets sur lesquels le travail se fait avec l’Esp, mais aussi des Canadiens et des Américains. « Mais puisque ce sont des projets de recherche, nous ne pouvons pas aller plus loin dans ce domaine ».

Recrutement : Priorité aux médecins sénégalais

A propos de la qualité des prestations chirurgicales au Sénégal, Pr Babacar Diao qui était seul à Kolda en 2000 pense qu’il y a beaucoup d’évolution. Il pense que les jeunes chirurgiens ne pourront pas vivre ce qu’il a vécu il y a 23 ans. Aujourd’hui, dit-il, il y a de grands hôpitaux dans toutes les régions avec des anesthésistes-réanimateurs et parfois plusieurs chirurgiens dans plusieurs disciplines. Alors qu’à l’époque, un seul chirurgien se retrouvait dans ce qui était considéré comme un bloc opératoire et qui n’était en réalité qu’une chambre  et une table opératoire dans un centre de santé. Et encore ! « Lorsque la prise en charge devient pluridisciplinaire, la qualité va avec », ajoute-t-il.

En matière de formation, précise-t-il, la priorité est accordée aux médecins sénégalais. Le principe est qu’il faut former les médecins sénégalais pour combler le gap. « Si nous avons 10 places à prendre, s’il y a 10 Sénégalais, nous les prenons et nous demandons aux étrangers de passer l’année prochaine », dit-il.

Les journées de la chirurgie sont l’occasion, selon les organisateurs, de passer en revue toutes les problématiques qui se posent à la pratique. Cette année, l’accent sera mis sur la démarche qualité et la multidisciplinarité, autrement dit, le travail d’équipe. Ce sera l’occasion de parler de thèmes comme la prise en charge du cancer, une intervention qui nécessite une démarche rigoureuse.

Prix Adrien Diop

Ce sera aussi le moment de rendre hommage aux pionniers de la chirurgie au Sénégal. Des chirurgiens qui, seuls dans toute une région, ont pris en charge les malades durant toute leur vie, au point d’être identifiés à ces régions. C’est le cas par exemple de Dr Sakho à Louga et le défunt Dr Bamba Diop à Thiès. « Ce sera un moment solennel pour dire merci à tous ces gens-là qui ont sacrifié leur vie », déclare Pr Babacar Diao.

Selon lui, si ceux qui sont à Dakar sont fatigués alors qu’ils travaillent dans des équipes de dix, on peut aisément imaginer ce qu’ont vécu ceux qui ont assuré seuls toutes les types d’interventions chirurgicales.

Il est également prévu de décerner cette année, le premier prix Adrien Diop pour la recherche et l’innovation, un prix qui récompense un travail d’équipe, et pas d’un individu.

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